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Monnaie électronique et inclusion financière digitale au Sénégal

  • June 29, 2017

  • Dakar, SÉNÉGAL

By Joy Kim, analyste en inclusion financière (MIX) et Sabine Mensah, spécialiste technique en finance digitale (UNCDF)

For more information, please contact:
Bery Kandji
KM Consultant, Sénégal
bery.kandji@uncdf.org

Sabine Mensah
Spécialiste Technique en Finance Digitale
sabine.mensah@uncdf.org

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L’an dernier, dans un billet du blog intitulé 10,000 Data points : New Senegal Workbook Explores Access at the Commune Level (10 000 points de données : Le nouveau dossier de consultation sur le Sénégal examine l’accès au niveau des communes), nous avons exploré le statut de l’inclusion financière dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Grâce à cette analyse de la distribution des points d’accès, nous avons fait quelques découvertes clés, notamment la croissance importante des points d’accès à la monnaie électronique et les progrès impressionnants réalisés par le Sénégal en termes d’inclusion financière depuis la signature de la Déclaration de Maya en 2012. Suite à la récente publication de la mise à jour du tableau de bord interactif pour le Sénégal, il semble que le moment est opportun de revenir sur la situation de l’accès aux services financiers dans le pays et d’examiner ce qui s’est passé durant l’année écoulée.

Le rôle central des services financiers digitaux au Sénégal continue à se préciser à mesure que le marché évolue. D’une part, Ecobank a lancé une application de services bancaires mobiles pour les clients, ainsi que des codes Masterpass QR pour les paiements chez les commerçants. D’autre part, Wari, opérateur de transfert classique d’argent et de paiement de factures, a annoncé l’acquisition de SENTEL GSM (Tigo), la deuxième société de télécommunications du pays. Et la Société Générale envisage de lancer bientôt un service de monnaie électronique. Même pour les opérateurs établis, la croissance se poursuit ; Orange a enregistré récemment son dix-millionième client sur sa plateforme de paiement mobile, Orange Money. Enfin, il est évident que la monnaie électronique est un outil indispensable pour de nombreux Sénégalais, et qu’elle est même devenue l’une des méthodes privilégiées lors de l’achat de moutons pour la fête musulmane de l’Aïd al-Adha.

Compte tenu de ces développements, il n’est pas surprenant que la monnaie électronique reste la force motrice de l’inclusion financière au Sénégal. L’an dernier, la moyenne des points d’accès pour 10 000 habitants était de 3,8 ; cette année, ce chiffre est passé à 5,2 (voir graphiques ci-dessous). Les données que nous avons recueillies nous montrent que plus de 81 % des points d’accès financiers appartiennent aux opérateurs de téléphonie mobile ; de plus, les points d’accès à la monnaie électronique ont augmenté de 37 % l’an dernier. Toutes les régions du Sénégal ont connu une croissance en termes de monnaie électronique, ce qui indique que les opérateurs de téléphonie mobile ont un énorme impact dans tout le pays. En ce qui concerne le nombre de nouveaux points d’accès, les trois régions les plus peuplées ont connu la plus forte croissance, avec Dakar qui ajouté plus de 1 100 nouveaux points d’accès liés à la monnaie électronique seulement.

Cependant, la monnaie électronique peut encore étendre sa portée. Dans quelques régions (Fatick, Kaffrine, Louga, Thiès et Diourbel), les gens sont davantage payés en argent comptant que dans le reste du pays (voir tableau ci-dessous). Si les opérateurs de réseau mobile peuvent encourager la digitalisation des salaires, ils pourront également augmenter le nombre de points d’accès dans ces zones, tout en offrant une sécurité accrue aux particuliers et des revenus plus élevés aux agents. Par ailleurs, tout comme nous l’avions constaté l’an dernier, il reste des populations non bancarisées en milieu urbain. Lors de notre exploration au niveau de la commune de Dakar, par exemple, nous avons pu constater que de nombreux quartiers de la ville sollicitent, sans réponse, des points d’accès aux services financiers.

Pour le reste de l’écosystème des services financiers au Sénégal, les points d’accès financiers offerts par d’autres types de prestataires de services financiers ont diminué de 3 % l’an dernier, même si ces institutions fournissent toujours des produits et services de qualité à diverses populations dans tout le pays. Notre analyse a révélé que les institutions de microfinance du Sénégal ont une présence plus importante dans les zones à taux de pauvreté élevé, par rapport aux banques commerciales, peut-être en raison de produits adaptés aux besoins de ces populations. La combinaison appropriée de services financiers devrait être un facteur important pour les opérateurs qui cherchent à se développer dans le pays. Et à cette fin, des partenariats entre opérateurs et institutions de microfinance sont nécessaires, afin de déployer la deuxième génération de produits des services financiers digitaux, tels que le prêt, l’épargne et l’assurance numériques, dans les zones non bancarisées du Sénégal.

Le programme Mobile Money for the Poor (MM4P) de l’UNCDF, lancé au Sénégal en avril 2015, en partenariat avec The MasterCard Foundation, appuie la construction d’un écosystème solide de services financiers numériques qui atteigne les personnes à faible revenu dans les pays les moins développés.

MM4P s’engage à améliorer les points d’accès financiers au Sénégal, et en particulier dans les zones rurales. Grâce à une analyse profonde du tableau de bord interactif pour le Sénégal, les 10 départements suivants ont été retenus pour une aide à l’expansion du réseau d’agents, en fonction des lacunes identifiées au niveau des points de services financiers et des possibilités économiques pour des réseaux viables d’agents : Nioro, Podor, Fatick, Bambey, Foundiougne, Vélingara, Linguère, Kanel, Kaffrine et Guinguinéo. Pour 2017, MM4P appuiera la mise en place d’un agrégateur, afin d’augmenter le nombre actif de réseaux d’agents de monnaie électronique dans les zones ciblées.

Avec environ 15 % des adultes ayant actuellement accès à un compte, le pays a encore un long chemin à parcourir pour arriver à une inclusion financière totale. Il est probable, compte tenu de ce que nous avons vu, que les services financiers digitaux continuent de voir le nombre de points d’accès augmenter. Il est donc important que le Sénégal poursuive ses efforts pour donner à ses populations non bancarisées et exclues l'accès à des services financiers appropriés.

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