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Inclusion financière et COVID-19: cette crise est-elle une opportunité pour la finance numérique? (2ème partie)

  • August 12, 2020

  • Enabling Policy and Regulation

Pour plus d'informations, veuillez contacter:

Ahmed Dermish

ahmed.dermish@uncdf.org

Elisa Sitbon Kendall

elisa.sitbon@uncdf.org

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Dans notre article précédent, nous mentionnons que les paiements numériques ont été l'un des outils utilisés par les gouvernements pour contrer les effets économiques de la crise sanitaire de la COVID-19.

En effet, en soutenant les efforts de distanciation sociale et en aidant à amortir les effets économiques de la crise (les gens continuaient de recevoir des salaires, des transferts d’argent d'urgence de proches ou des aides sociales du gouvernement sans quitter leur domicile), les paiements numériques et l'inclusion financière numérique n'ont jamais été aussi nécessaires qu’aujourd'hui.

Au sein de notre équipe, nous avons pu constater directement comment certaines réformes réglementaires et politiques peuvent favoriser l'inclusion financière numérique. Grâce à une action rapide, certains pays procèdent déjà à des réformes réglementaires nécessaires depuis longtemps et se propulsent ainsi, sous la contrainte, au rang des pays les plus avancés en termes d'inclusion financière.

Mais concrètement, comment les pays ont-ils réagi jusqu'à présent? Que peuvent faire les pays qui souhaitent favoriser l’inclusion financière numérique ? Certaines banques centrales prennent déjà des mesures efficaces :

- Les banques centrales peuvent assouplir les procédures d’identification des clients afin de favoriser l'ouverture de comptes d'argent mobile. Par exemple, depuis le 1er avril, la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest permet aux fournisseurs d'argent mobile d'identifier les clients à distance. Elle permet également l'utilisation de données précédemment recueillies lors de l'ouverture de leur compte de téléphone mobile, pour l'identification bancaire. La Banque du Ghana a aussi simplifié les procédures d'identification des clients pour l’ouverture de comptes d'argent mobile. Il en va de même en Égypte, où la Banque centrale a demandé aux banques de permettre d’ouvrir un compte d’argent mobile en utilisant les données du client recueillies lors de l’activation de la carte SIM par l’opérateur de téléphonie mobile.

- Les banques centrales peuvent demander aux fournisseurs d’argent mobile que les transactions soient gratuites afin de favoriser l'utilisation des paiements mobiles. La Banque du Ghana a demandé que les transactions soient gratuites en-deçà de 18 dollars USD. Au Kenya, où la pénétration des comptes mobiles est la plus élevée, la Banque centrale a demandé à Safaricom d'encourager l'utilisation des paiements mobiles. En réponse, Safaricom a éliminé les coûts de transaction de personne à personne (P2P) de moins de 1 000 schillings kenyans (USD 10) pendant trois mois (jusqu’au 30 juin). En République démocratique du Congo (RDC), la Banque centrale du Congo a annoncé la suppression des frais sur les transactions en monnaie électronique et des frais variables sur les transactions inférieures à USD 1 460, jusqu'à fin décembre 2020.

- Les banques centrales peuvent relever les plafonds de transactions d'argent mobile pour que les personnes puissent recevoir / envoyer des fonds d'urgence. Par exemple, la Banque Centrale du Kenya a augmenté les plafonds de transactions MPesa de 70 000 Kshs (USD 665) à 150 000 Kshs (USD 1425). En RDC, la Banque centrale a aussi relevé les plafonds de transactions quotidiennes à USD 2 500 contre USD 500 jusqu’à présent.

- Les banques centrales peuvent promouvoir le paiement de factures via l'argent mobile pour permettre aux gens de payer leurs services publics et leurs taxes. En RDC, la BCC encourage également l'utilisation d’argent électronique par les entreprises et les services publics pour régler les factures et payer les impôts.

D'autres mesures pourraient être prises afin de rendre l'argent mobile encore plus facile d’accès et d’utilisation et promouvoir l'inclusion financière. On pourrait par exemple s'assurer que les réseaux d'agents d'argent mobile disposent de suffisamment de liquidités pour que les clients puisent encaisser ou retirer de l'argent, en créant un fonds qui permettent de prêter des fonds aux agents d’agents. Ils pourraient également promouvoir les paiements marchands numériques en temps réel et sans contact grâce aux codes QR.

Toutes ces réformes qui ont été mises en place dans l'urgence de la situation, pourraient potentiellement avoir un impact durable si elles atteignent les plus vulnérables, en particulier les femmes. En fait, selon un rapport d'ONU Femmes dans tous les domaines, les impacts de la COVID-19 sont exacerbés pour les femmes et les filles. Il sera essentiel de comprendre comment ces réformes affectent les plus vulnérables, et les femmes en particulier. Certains pays mettent déjà en place des systèmes de données pour mesurer l'impact de la réforme politique entreprise en réponse à la COVID. Consultez ici notre article [ADD LINK] qui explore cette idée.

Il y aura un avant et un après COVID. Cette crise peut être l'occasion de créer un système bancaire plus inclusif. Les banques centrales peuvent contribuer à favoriser l'inclusion financière des populations vulnérables en prenant des mesures adaptées au contexte de leur propre pays et alignées sur les meilleures pratiques. C'est une opportunité de réaliser plus rapidement la stratégie d'inclusion financière d'un pays et d'élargir encore la portée de la finance numérique aux personnes qui en bénéficieront le plus.